CRES/001/05/17: Résolution sur la situation au Burundi
Le Forum des ONG, réuni lors de la 60ème Session Ordinaire de la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples (la Commission), à Niamey, Niger
Extrêmement Préoccupé par l’impasse politique persistante continuant d’entraver la recherche d’une solution pacifique à la crise au Burundi et par les nouveaux refus exprimés par les autorités burundaises de s’engager dans un dialogue inclusif avec l’opposition et la société civile indépendantes ; Rappelant la décision du Conseil de Paix et de sécurité de l’Union africaine du 17 décembre 2015 soulignant que « seul un dialogue sincère et véritablement inclusif, fondé sur le respect de l’Accord d’Arusha et de la Constitution du Burundi, pourra permettre aux parties prenantes burundaises de surmonter les graves difficultés que connaît leur pays ainsi que de renforcer la cohésion sociale, la démocratie et l’État de droit » ;
Profondément préoccupé par la détérioration continue de la situation sécuritaire et des droits humains dans le pays et la poursuite, après deux ans de crise, des assassinats ciblés et exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées, actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, crimes sexuels, arrestations et détentions arbitraires massives et autres violations graves des droits humains ;
Rappelant que la Commission a conclu à la suite de son enquête au Burundi que des violations graves et massives des droits humains ont été commises depuis avril 2015 en grande majorité par les forces de sécurité du gouvernement burundais en collaboration ou pas avec la milice Imbonerakure ; et Gardant à l’esprit que le rapport de l’enquête indépendante des Nations unies au Burundi (EINUB) a mis en avant que des violations des droits humains « systématiques et constantes » sont commises au Burundi, et que « le danger du crime de génocide est grand […] étant donné l’histoire du pays » et Rappelant que le Secrétaire général des Nations unies a indiqué dans son rapport de février 2017 sur le Burundi que « les facteurs potentiels d’une escalade de la violence demeurent bien présents »;
Demeurant extrêmement préoccupé que les Tutsi soient des cibles privilégiées de la répression des forces de sécurité burundaises et Alarmé par la recrudescence des opérations de représailles à l’encontre des militaires tutsi, ce qui continue de remettre en cause les équilibres ethniques issus de l’Accord d’Arusha au sein de cette institution et risque d’aboutir à une épuration de l’armée burundaise ;
Dénonçant la répression menée par les autorités dans les milieux étudiants suite aux protestations dans certaines universités contre la réforme du système de bourses universitaires et notamment la condamnation et l’emprisonnement de cinq représentants des étudiants de l’Université du Burundi ;
Condamnant fermement les récents appels aux viols et aux meurtres des opposant-e-s proférés par des membres de la ligue du parti au pouvoir, les Imbonerakure, dans différentes provinces du pays ; Condamnant également les crimes graves commis quotidiennement par cette milice sur l’ensemble du territoire et qui participent à faire régner de façon constante un climat d’insécurité et de violence dans le pays ; et Demeurant préoccupé des allégations faisant état de leur encadrement, entraînement paramilitaire, armement et utilisation comme supplétifs des services de sécurité ;
Condamnant également les graves crimes commis par des groupes armés non identifiés, notamment les assassinats ciblés, et qui participent également de l’escalade de la violence ;
Rappelant que la Commission a recommandé dans son rapport d’enquête paru en mai 2016 l’établissement de mécanismes d’enquête et de justice afin de tenir pour pénalement responsables les auteurs de violations des droits humains et que la Commission a autorisé dans sa Résolution CADHP/Rés.357 (LIX) 2016 la conduite d’une mission de suivi des recommandations formulées dans ce rapport ; Dénonçant l’impunité généralisée dans le pays et l’absence totale de mécanisme, au niveau national, permettant de mener des enquêtes indépendantes et impartiales, de poursuivre et condamner les auteurs des crimes commis et de fournir des réparations aux victimes ;
Dénonçant la répression continue exercée à l’encontre des défenseurs des droits humains ayant notamment mené aux gels des avoirs, à la suspension et/ou à la radiation des principales organisations de défense des droits humains dans le pays ; Dénonçant également les entraves à la liberté de la presse et l’accès à l’information et toutes les formes d’intimidation et d’attaques auxquelles sont soumis les journalistes au Burundi ;
Alarmé par la décision des autorités burundaises de créer une Commission chargée de proposer un projet de révision de la Constitution burundaise pouvant mener à la suppression de la limitation des mandats présidentiels ; et Profondément préoccupé par l’annonce, le 30 décembre 2016, de la possible candidature du président Nkurunziza à un quatrième mandat, qui pourrait mener à une escalade dramatique de la violence dans le pays ; Rappelant à cet effet que le Secrétaire général des Nations unies a indiqué dans son rapport de février 2017 sur le Burundi que « l’adoption de révisions constitutionnelles allant à l’encontre de dispositions de l’Accord d’Arusha ferait courir le risque, dans les circonstances actuelles, de faire replonger le pays dans un conflit armé, avec des conséquences imprévisibles pour la région » ;
Regrettant que la coopération avec le Bureau du Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme au Burundi demeure suspendue depuis le 11 octobre 2016, que les trois experts de l’EINUB soient toujours considérés comme personae non gratae et que le gouvernement du Burundi ait refusé l’accès au territoire burundais à la Commission d’enquête internationale mandatée par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies ;
Préoccupé par la détérioration dramatique de la situation socio-économique dans le pays, par le fait qu’environ trois millions de Burundais ont besoin d’une assistance humanitaire immédiate et par la grave épidémie de paludisme à laquelle doit faire face la population ; Rappelant que plus de 410 000 personnes ont fui le pays depuis avril 2015 ;
Le Forum des ONG appelle la CADHP à adopter une Résolution qui :
Exhorte les autorités du Burundi à :
Appelle l’Union africaine à :
Appelle la Procureure de la Cour pénale internationale à :
Fait a Niamey – 7 Mai, 2017